Mis en ligne le mercredi 26 novembre 2008.
Un article de Vanessa Pinto [1]
L’exercice par certains étudiants d’un « petit boulot »
dans l’animation résulte d’un ajustement entre, d’une
part, les propriétés à la fois objectives et subjectives de
cette population et, d’autre part, les caractéristiques et
les exigences d’un secteur historiquement marqué par
une pratique bénévole et des valeurs spécifiques.
Cet
article, qui repose sur une enquête ethnographique,
tente de montrer en quoi ces étudiants ont vocation à
occuper occasionnellement cet emploi et à y être consi-
dérés comme idéalement ajustés, alors même qu’ils
n’envisagent pas d’y faire carrière.
extraits :
« Aujourd’hui, au sein du secteur de l’animation, trois groupes peuvent être distingués à partir des données disponibles, des travaux publiés et des discours indigènes
Le premier groupe, que l’on pourrait qualifier de groupe des « militants »,
hérite de l’engagement bénévole qui a caractérisé l’éducation populaire. Sa figure
idéale-typique en est l’instituteur de sexe masculin, né avant les années 1960, qui,
pendant les vacances scolaires, encadre des colonies ou « centres de vacances et
de loisirs » (CVL) à titre d’animateur ou de directeur et parfois des stages BAFA à
titre de formateur ou de directeur.
Le deuxième groupe, celui des animateurs « occasionnels », est représenté
par des jeunes scolarisés, étudiants ou lycéens, qui voient dans l’animation une
façon ajustée à leurs dispositions et à leurs attentes de gagner un revenu
d’appoint et/ou de s’initier aux métiers de l’éducation ou du travail social auxquels
ils se destinent. Très présents dans les CVL, ils le sont également dans les centres
de loisirs sans hébergement (CLSH), les filles étant largement majoritaires au sein
des centres maternels.
Enfin, le troisième groupe, celui des animateurs « professionnels » (y compris
précaires), est constitué d’individus plus ou moins jeunes dont l’activité principale
et la carrière probable se situent dans le secteur de l’animation, principalement
dans les CLSH. Essentiellement féminin, moins diplômé et d’origine plus populaire
que la catégorie précédente, souvent issu des « quartiers », ce personnel parfois
doté de diplômes professionnels a accédé à l’animation par la voie des politiques
d’emploi mises en place à partir des années 1980 ou par celle des concours de la
fonction publique territoriale.
Il est essentiel, pour comprendre l’ajustement d’étudiants au secteur de l’anima-
tion, d’avoir à l’esprit l’existence de ces trois groupes : si certains étudiants semblent
en tout point détenir le profil de l’emploi, c’est parce que cet emploi a été construit par
des agents qui présentent des affinités de dispositions avec les leurs et qui semblent
de ce fait reconnaître en eux – davantage qu’en certains professionnels – des héritiers
légitimes, c’est-à-dire aptes à recevoir un héritage de normes et de pratiques, autre-
ment dit les valeurs du métier. D’où la distinction, apparemment paradoxale, entre,
d’un côté, la motivation, le désintéressement voire le professionnalisme des occa-
sionnels et, de l’autre, la routine et les soucis de carrière attribués aux professionnels,
ou, en d’autres termes, la distinction entre vocation et profession, où sont dissociés
les deux versants de la notion de Beruf6. Distinction assez répandue qui renvoie à
d’autres, comme celle qui oppose les colonies, lieux emblématiques et paradis perdus
de l’animation, aux centres de loisirs, parfois assimilés à de simples garderies.
»

- Les étudiants animateurs : un petit boulot vocationnel
- par Vanessa Pinto
Sommaire du n°48 d’Agora débats-jeunesse :
Faire carrière dans l’animation socioculturelle ?
Un dossier coordonné par Francis Lebon et Léa Lima
http://www.injep.fr/Faire-carriere-dans-l-animation.html